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Les supplices infligés aux Indiens

 

Les descriptions des supplices infligés aux Indiens regorgent dans l’ouvrage, et sont mis en valeur par les gravures de Théodore de Bry. Ces gravures sont présentes afin de renforcer l’indignation du lecteur durant la lecture.

 

De Bry ajoute donc une exagération iconographique, des images violentes et polémiques ayant un impact immédiat sur le lecteur. Il donne un complément naturel au texte et choisit de souligner les éléments les plus marquants et les plus cruels. C’est en quelque sorte une mort mise en spectacle.

 

Le texte de Las Casas est un acte d’accusation visant à lister les atrocités auxquelles étaient soumises les Indiens et à choquer les esprits. Il serait ici inutile d’essayer de reprendre tous les supplices décrits dans La destruction des Indes, aussi seuls quelques exemples seront donnés.

 

Dans la gravure Travaux forcés des Indiens et des Indiennes, il est clairement montré que les Indiens – censés être les barbares violents – sont ici torturés par l’homme européen et civilisé qu’est l’Espagnol. Le dynamisme et la violence déployés par les conquistadors à l’avant-plan contrastent avec l’immobilité des deux victimes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Théodore de Bry, IV. Travaux forcés des indiens et des indiennes (Île espagnole)

 

Ce qui se dégage le plus de cette gravure est la violence et l’expression froide des conquistadors dans leur « beau » vêtement. Ils prennent pied sur des terres inconnues et prennent le pouvoir. Les Indiens qui paraissent simples par leurs coutumes et leur manière de vivre sont traités de barbares, ce qui semble ici assez paradoxal.

 

Cette gravure interprète le texte de Las Casas : « Le soin et souci qu’ils avaient d’eux était d’envoyer les hommes aux minières pour en faire tirer de l’or, qui est un travail intolérable, et les femmes, ils les mettaient aux champs, aux métairies, pour labourer et cultiver les terres, qui est un grand travail, voire même pour les hommes les plus robustes et les plus forts. »

 

La seconde gravure choisie est la XVIIe, Mutilations ordonnées par J. de Quesada en Nouvelle Grenade, représente la cruauté sans relâche des envahisseurs espagnols qui coupent l’extrémité supérieure des membres des Indiens.

 

« Et parce qu’ils [les Amérindiens] ne dirent pas qui était le seigneur qui avait succédé, il coupa aux uns les mains et fit jeter les autres, hommes et femmes, devant chiens acharnés qui les mettaient en pièces. Et de cette manière, il a tué et détruit beaucoup d’Indiens et d’Indiennes. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Théodore de Bry, XVII. Mutilations ordonnées par J. de Quesada en Nouvelle Grenade

 

A l’avant-plan, deux hommes et une femme subissent le supplice d’un bourreau, la douleur est exprimée sur leurs visages malgré une expression d’incompréhension face à toute cette haine. Au second plan, un groupe d’hommes et de femmes attendent le martyre.

 

Les scènes se succèdent : à l’arrière-plan, des fuyards se font dévorer par des chiens. À chaque endroit du tableau, il n’y a de place que pour l’horreur. Sur les montagnes du fond de cette estampe, il est possible de voir un horizon de tueries, des Indiens poussés dans le vide par les colons. Même dans le paysage, l’ajout d’épisodes de terreur prend place. Les victimes, malgré la douleur montrée par les bouches ouvertes, gardent cependant une certaine dignité et des attitudes élégantes. Le graveur voulait également montrer que ces exactions se perpétraient à grande échelle : 29 victimes pour 10 bourreaux.

 

Ces gravures ne sont que deux exemples pris parmi les dix-sept réalisées par de Bry. Dans celles-ci, de Bry montre les conquistadors comme étant les ennemis de la conquête, du message évangélique et des Amérindiens. Néanmoins, cette vision des choses n’est pas universelle car elle ne pointe qu’une part du genre humain : les Espagnols catholiques.

 

Il est important de souligner que ces gravures ont été réalisées dans un atelier de Francfort par des dessinateurs ne disposant d’aucune documentation ethnographique. Le but de cette iconographie était de montrer l’injustice impunie à laquelle s’ajoute le martyre d’un peuple innocent.

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